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MessageSujet: La pîpe, ça détend.    La pîpe, ça détend.  EmptyMar 22 Juil - 18:03

Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il est foutrement bien gardé, ce camp. Une dizaine de gardes me regardent arriver, dans le froid. Mon canon scié est fourré dans une des grandes poches de ma veste et ils doivent se dire que je ne représente pas un danger conséquent : un seul des plantons m’épaule de sa carabine pendant que les autres discutent, les mains dans les fouilles. Moi qui ai vécu en solitaire ces dernières semaines, j’en ai ma claque de vivoter et de survivre en détroussant ou tuant. Je veux vivre et faire honneur à ma femme et à mon fils, qu’ils soient fiers de moi d’où ils me regardent. S’ils me regardent encore, avec toutes les saloperies que j’ai faites ces derniers mois… Oh, et puis m%rde ! Faut pas que je me la joue sentimental, c’est pas le moment. Faut que je me réchauffe les balloches et que je bouffe un truc. Je biberonne ma bouteille de calva depuis hier, sans rien manger. Il est temps de grignoter quelque chose.

Je marche d’un pas décidé, même si c’est pas forcément évident dans cette neige à la c%n. La m%rde blanche, voilà comment je l’appelle. Déjà avant les bombardements je l’aimais pas. J’ai jamais compris pourquoi tout le monde était si content dès qu’elle commençait à tomber. Là où tout le monde se réjouissait et s’amusait, moi je me disais que j’allais être emm%rdé à déblayer devant chez moi, à me taper la route jusqu’au boulot à trente à l’heure pour pas me viander, et tout ça. Faut dire que quand il neige, dans les Vosges, c’est pour de bon ! Rien à voir avec la fine couche grise qui fait peur aux parigos (têtes de veaux). Bref. Je m’avance d’un pas soit-disant décidé, même si je manque de me casser la gu%le tous les cinq pas à cause du sol recouvert de la chose blanche que je ne citerai plus. Doivent bien rigoler, les gardes. D’ailleurs, en parlant de ceux-là. C’est un panachage d’uniformes et de vêtements civils et je sais pas vraiment qui est quoi : gendarmes, soldats, chasseurs, miliciens ? Je m’en fous, ils ont pas l’air hostiles et du coup j’aurai pas besoin de faire parler la chevrotine. En même temps, j’aurai même pas le temps d’appuyer sur la détente de mon fusil que je me ferai plomber de tous côtés : sont équipés comme des porte-avions, niveau armement, les cochons. Tant mieux, ça veut dire qu’on est peinards, en sécurité, au camp.

Je lève les mains pour faire les derniers mètres et je me présente d’une voix puissante :
« Je suis Victor Duroc, je viens de l’autre bout de la France et, même si j’ai une sale gueule, je suis un bon gars. Laissez-moi vous rejoindre et le prouver, camarades. » Comme présentation, on peut pas faire mieux, j’pense. J’annonce la couleur d’entrée de jeu, comme ça y a pas de surprises. Je vois quelques sourires éclairer les trognes des gardes : la partie est gagnée. Un d’eux sort des rangs et me pose des questions : où j’étais pendant les bombardements, ce que j’ai fait après, comment j’ai survécu jusqu’à maintenant, et tout ça. Foutredieu, c’est la Gestapo ici ou quoi ? En même temps je comprends qu’ils veuillent savoir qui ils accueillent et je réponds plus ou moins honnêtement, en occultant le fait que j’ai commis quelques rapines dont y a pas de quoi être fier. Le mec prend des notes sur une fiche, il m’explique que ça sert pour leur bureau de recensement. Admettons, gars. J’suis pas contrariant. Il me demande si je suis armé, j’acquiesce. Il m’explique que je dois leur confier mon calibre en attendant de faire mes preuves et qu’ils m’accordent leur confiance. Ça se complique, là. J’ai pas envie de leur laisser mon seul ami. J’essaye d’argumenter mais les gardes sont inflexibles : si je veux faire partie du camp, je dois consigner mon canon scié. Rha, non, pas moyen ! Ils sont peut-être bien armés mais j’ai jamais aimé confier ma sécurité à d’autres. Mon fusil je l’ai depuis des années et même si j’en ai scié la crosse et le canon, je l’adore. Il tire droit et fait plein de dégâts et c’est la seule relique de mon ancienne vie, avec ma pipe en racine de bruyère. Je fais quoi, alors ? Je fais demi-tour et je crève probablement de faim ou je leur file mon 12 ? Rhaa, fais ch%er !

Je sors mon arme et leur tend, canon tourné vers moi, qu’ils voient pas ça comme une agression. Le mec qui m’a interrogé le prend et le mets dans un sac, genre sac de pommes de terre. J’y dépose également la cinquantaine de cartouches de chevrotine qui remplissent quasiment toutes mes poches en disant : « Ça s’appelle revient, ça, camarade. Le paumez pas ! » Mon interlocuteur me rassure en me disant que mon matos serait gardé en sécurité et que personne n’y touchera jusqu’à ce que je le récupère, si je le récupère. Puis, il désigne un de ses gardes pour me faire faire le tour du proprio.

Tout y passe : la station-service en elle-même, les différents districts, le resto transformé en clinique, les tentes, et tout ça. Il veut pas forcément me faire une démonstration de force, le type qui me sert de guide est un jeune mec un peu simplet super sympa, mais ce qu’il me montre m’impressionne : tout est bien organisé et y a des gardes et des fortifications partout. Parfait, parfait, je vais enfin pouvoir roupiller peinard. A propos de ça, il m’explique la démarche à faire pour demander une tente. J’y comprends que dalle mais je fais comme si, pour pas le forcer à répéter : je verrai ça plus tard. Ce qui compte, c’est de bouffer. Il me laisse devant les tentes de ravitaillement en me souhaitant une bonne continuation. Bon vent, simplet !


Plein de gens font la queue et y a pas moyen de gruger tout le monde : là aussi c’est plein de gardes. Je me mets à la fin de la file, comme un foutu mouton, et j’attends mon tour pour être servi. C’est long, par le sang du Christ ! J’en ai ma claque : je me jette un coup de gnôle dans le gosier et bourre ma pipe de tabac. Je gratte une allumette et je fume : que c’est bon, b%rdel. Quasi-immédiatement, mon voisin de devant se retourne. C’est un petit mec, dans les cinquante balais, qui a petite gu%le de souris. Il me dit : « M’sieur, faut pas fumer dans la file, ça indispose, m’sieur. » Je sers les poings et manque de le cogner. Je vais lui en foutre, du « m’sieur » , moi ! Je me ravise, en voyant qu’un garde jette un œil dans ma direction. Foutue vie en collectivité ! Faut que j’me réhabitue, vaindieu. Alors je réponds rien et je quitte la file d’attente, histoire de fumer ma pipe tranquille. Le tabac est une denrée précieuse et même si j’ai les crocs, la pipe, ça détend.

Je m’adosse à un tas de bois et regarde autour de moi. Des civils qui bossent, des gardes qui patrouillent. Sans trop m’avancer, je pense qu’à choisir, je préfère être celui qui se ballade avec un calibre à la main que le mec qui manie la pioche. Faut que je me renseigne. J’observe le soldat le plus proche de moi. Il est à dix mètres, il a l’air de se les geler sévère et, chose extraordinaire, il a la même tête que Bourvil ! C’est trop fort, je retrouve le sourire que j’avais perdu depuis longtemps. Je me fais même un film tout seul : quand j’irai lui parlerai, je lui dirai quoi ? Non mais dites donc !? Mon vélo, mes souliers… Je m’approche de lui, tout sourire. Pile au moment où il se fait prendre à parti par une jeune femme, avec une combinaison militaire genre bizarre. Je m’arrête, pour les laisser causer. J’suis pas du genre à arriver comme un cheveu sur la soupe, j’ai reçu un minimum d’éducation, dans ma Lorraine profonde.

Elle est toute mignonne, cette petite rouquine. J’suis sûr qu’elle, c’est du genre à dire qu’elle pas rousse mais blonde vénitienne. A moins que ce soit pas sa couleur naturelle ? Elle parait trop farouche pour laisser les inconnus vérifier à leur guise et de toute façon il fait trop froid pour penser à ça. En parlant de ça, la pauvre, elle doit greloter de froid dans sa tenue légère. Ses tétons doivent être tellement durs qu’ils peuvent servir de porte-manteau, si besoin. Pauvre petite, ses supérieurs sont sans cœur, à la laisser dans le froid, comme ça. J’entends la fin de leur conversation, sans espionner. Bourvil crie presque : « A vos ordres, lieutenant ! », la salue et se casse Dieu sait où. Attends voir, c’est un officier, elle ? Pas du tout le genre de petite biche apeurée que je pensais au premier coup d’œil. Tant mieux, elle va pouvoir me renseigner, vu que c’est une des huiles du camp. Je m’avance vers elle, résolu.

"Victor Duroc, tout nouveau tout neuf au camp. Je sais pas si je dois t’appeler lieutenant ou te vouvoyer, vu que j’suis pas militaire, mais je ferai comme tu voudras. J’suis pas militaire mais je sais me servir d’un fusil et j’ai pas froid aux yeux. Tu recrutes pas, par hasard ? Si tu veux, je te vouvoierai, une fois sous tes ordres!"
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Marielle Beaumarchais

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MessageSujet: Re: La pîpe, ça détend.    La pîpe, ça détend.  EmptyVen 8 Aoû - 13:42

J’aurai du mieux me couvrir, ce matin. Très certainement même. Mais j’étais bien trop soulagée d’être sortie de cet hôpital de fortune, de pouvoir bouger à ma guise, sans risquer que Comet, Raulne ou qui que ce soit, me passent un savon parce que je n’obéissais pas aux ordres de Reh, et que je ne restais pas alitée. J’y étais pas restée longtemps, mais déjà bien trop. J’avais filé fissa dans ma tente, récupérer mon deuxième flingue. On n’était jamais trop prudent, et même si Comet m’avait dissuadée d’avoir les deux avec moi, j’appréciais pas particulièrement que l’arme ait été dans ma tente, à la disposition de n’importe quel péquin qui était assez stupide pour y entrer et me la voler. Ca aurait été à leurs risques et périls, s’ils avaient agi ainsi. Je soupirais, en l’y voyant. Personne ne l’avait pris. Je m’en défendais, mais peut-être bien étais-je comme tous les militaires, au final : incapable de me sentir à mon aise, sans mes armes. Peu importait les causes, cela dit, tant que je n’usais pas abusivement de mon droit à en porter – et tel n’était pas le cas. Je ne m’attardais pas, empressée que j’étais de reprendre mes fonctions. Je ne passais pas par la tente où prendre nos repas. Pas que je ne souffre pas de la faim, mais je pouvais attendre pour l’instant. Même si cela me serait déconseillé. Je prenais rapidement la direction des tentes de commandement. Voir avec Comet si on prévoyait de nouveaux raids, si on avait besoin de moi pour faire un rapport sur le précédent, si on envisageait d’y retourner pour mieux évaluer la menace. J’y étais à peine entrée, qu’on s’adressait à moi d’une manière un peu rustre, et qui m’énervait grandement, mais je gardais ma remarque acerbe pour moi – je n’avais pas l’énergie de partir en croisade contre les connards qui connaissaient pas la politesse la plus élémentaire, et qui sous prétexte que j’avais un grade moindre, ou que j’étais une femme, voire les deux, allez savoir, se permettaient de me parler comme au morceau de viande qu’ils donneraient à leur chien.

Bref. Je partais sans demander mon reste, et me dirigeait à l’endroit où le militaire défenseur du camp devait être en faction. Près des fameuses tentes de ravitaillement que j’avais évitées. J’envisageais de choper au passage de quoi grailler, de préférence en passant devant tout le monde prétextant un besoin de retourner à mon poste, mais je ne m’y risquais pas. Inutile de frustrer qui que ce soit, et de m’octroyer des privilèges que je n’avais pas. Au lieu de ça, je repérais le soldat demandé par les hautes autorités de la départementale. Je retenais un juron, à l’attention des dites hautes autorités. J’le connaissais pas, ce soldat. Enfin, je l’avais déjà vu et lui avais déjà parlé, sinon j’aurai pas su qui il était, mais pas des masses. Il m’avait pas l’air trop con, en tout cas. De toute façon, con ou pas, femme ou pas femme, j’étais son lieutenant, et ça, ça suffisait à faire qu’il se risque pas à s’opposer à moi. De toute façon, s’il avait essayé, je l’aurai remis à sa place, et il aurait pas recommencé. Si les gens qui bossaient avec moi, ou étaient soumis à mon autorité, apprenaient une chose, c’était bien ça. Mais il me défiait pas, il oserait pas. Même dans cette situation où tout était brouillé, les militaires restaient des militaires, et se soumettaient à la hiérarchie. En même temps, c’était bien le plus important de ce qu’on nous apprenait : respecter la hiérarchie, pour éviter qu’il y ait de la merde lors d’interventions. Armée de l’air, de la terre ou navale, ça devait être pareil. Si l’ordre était pas respecté, c’était le bordel, et si c’était le bordel, c’était risquer sa vie inutilement. Déjà qu’on la risquait continuellement, mais ça serait. Obéir empêchait pas de mourir, mais ça permettait d’avoir une meilleure chance de survie. Sans mon escadrille qui avait attiré l’attention des missiles qui nous avaient touchés, sans la riposte de certains d’entre eux, j’aurai jamais pu m’éjecter, j’y aurai laissé la vie, comme eux.

Je laissais un instant la douleur prendre place sur mon visage, avant de la chasser. Le soldat était toujours là, et je comptais pas me laisser aller à de telles pensées devant lui. Devant personne, mais encore moins devant un soldat qui répondait à mes ordres. Laisser voir ses faiblesses n’étaient pas une qualité, à l’armée. Ou du moins, je l’avais toujours vu ainsi. « A la tente de commandement, Soldat, ils t’attendent. » Son « A vos ordres, lieutenant ! » retentit, tonitruant et presque déplacé dans le peu de bruit ambiant. Mais au moins déguerpissait-il, et me laissait-il l’occasion de m’isoler et de me réconcilier avec ma culpabilité. Je soupirais, songeant que c’était bien la dernière chose que j’avais envie de faire – tant concernant celle vis-à-vis de mes anciens collègues et amis décédés, que celle due au fait que je n’avais pas mené à bien mon expédition, et que j’avais fuit devant une menace probable. Blessée comme je l’étais et entourée de civils, je n’avais pas eu le choix, même si j’avais encore du mal à l’accepter, mais ça ne changeait pas le fait que je n’étais pas en paix avec cette lâcheté dont j’avais preuve. Je m’apprêtais à tourner les talons pour emprunter le chemin que le soldat avait pris auparavant, quand on s’approcha et m’apostropha. Quelqu’un que je ne connaissais pas. Etait-il arrivé durant mon absence, ou ma convalescence ? Probablement. Enfin, je ne prétendais pas connaître tous les gens évoluant dans notre camp improvisé.

Je concentrais mon attention sur lui, l’écoutant sans l’interrompre, et n’appréciant guère sa familiarité. Je m’efforçais de ne rien en montrer, toutefois – inutile de le braquer, avant de savoir ce qu’il voulait, et à quoi il pouvait être utile, étant donné qu’il cherchait à se mettre à disposition, à faire bénéficier le camp de ses capacités. Fort bien. « Lieutenant Beaumarchais. Et j’apprécierai que vous me vouvoyiez en effet. Êtes vous armé ? Ou l’étiez vous avant d’arriver, du moins ? Si vous venez me voir, c’est que l’on ne vous a pas assigné une tâche, je suppose. Je ne suis pas en charge des forces de défense, aussi je devrais vous rediriger vers le Lieutenant Raulne. Le seul poste que je pourrais vous offrir serait de participer aux expéditions visant à récupérer toutes les denrées dont nous avons besoin. Mais vous ne m’avez pas parlé de savoir manier un fusil par hasard. Dans tous les cas, toutes les mains sont les bienvenues. Je ne peux vous garantir que Raulne vous laisse en revanche le rejoindre si facilement. Au delà de tester votre maîtrise des armes, il devra surtout mettre à l’épreuve votre capacité à répondre aux ordres. »

Je n’ajoutais rien. A lui de voir s’il décidait poursuivre cette conversation. Dans tous les cas, il semblait disposé à se soumettre à l’autorité militaire – mais cela ne lui venait pas spontanément, comme le prouvait la manière dont il s’était adressé à moi. Cela pouvait être un problème. Ou ne pas en être, mais je ne pouvais pas gager de ce fait, dans un sens ou dans l’autre. Peut-être pourrais-je le remarquer plus tard.


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